Anatole France, l’inconnu du bac 2016
Cette année, les premières S qui passaient le baccalauréat de français sont, paraît-il, tombé sur un os nommé Anatole France. Pour nombre de candidats (et de candidates, bien sûr), Anatole était l’inconnu du bac 2016. Un inconnu devant lequel les scientifiques interrogés ont mordu la poussière…
Les séries S et ES devaient en effet plancher sur son Eloge funèbre d’Emile Zola. Un « hic », bien sûr, quand on n’a jamais entendu parler d’un des auteurs les plus prolifiques de la charnière entre le XIXe et le XXe siècles. Et peut-être pas plus d’Emile Zola, sans doute…
Anatole France, « tu es qui toi » ?
Au-delà de Zola, tant pis pour Thaïs, la Reine Pédauque, Crainquebille, les dieux assoiffés, les pingouins, et quelques autres…
Un certain nombre d’élèves candidats ont même cru qu’il s’agissait d’une femme ! Au diable donc l’affaire Dreyfus. Et tant pis pour tous ces héros, guerriers anonymes, dont il a vanté les faits d’un héroïsme quotidien. Et oublié le prix Nobel, et les nombreuses rues. Mais peut-être que, sans parler même de Paris, ces jeunes gens ignorent Saint-Etienne, Tours, Montpellier, Rouen, Soissons, Cholet… Pour ne parler que de la France.
Mais qu’à cela ne tienne ! Jamais à cours d’idées loufoques, Najat Vallaud-Belkacem, qui gère l’Education nationale, demande qu’à l’avenir le sexe des auteurs soit ajouté aux critères de sélection des œuvres. Et pourquoi pas alors les auteurs transgenres et autre LGBT ? En attendant, on rira drôlement quand l’année prochaine ces incultes découvriront George Sand !
Evidemment, à l’heure de l’Euro 2016, ces jeunes gens connaissent sans doute mieux N’GoloKanté, Patrice Evra, Hugo Lloris ou Steve Mandanda. On ne peut pas réviser ses classiques et fréquenter la « fan zone », et limiter le monde à un ballon de même forme permet sans doute d’oublier la vie réelle.
Et pourtant, Anatole France, malgré des prises de position politiques que l’on peut ne pas partager, a quelque chose à apporter, et parfois d’étonnement moderne. « On croit mourir pour la patrie, on meurt pour des industriels », écrivait-il ainsi à une époque dont on nous dit pourtant qu’elle n’ignorait point le patriotisme.
Il est vrai qu’un homme qui a écrit : « A mesure qu’on avance dans la vie, on s’aperçoit que le courage le plus rare est celui de penser », ne peut qu’agacer des enfants qui, justement, n’en ont pas pris le temps…
François le Luc / reinformation.tv/
Biographie courte d'Anatole France
Jacques Anatole François Thibault, de son vrai nom, dont le père était libraire, commence sa carrière par la poésie avant de s'orienter vers la prose. D'abord bibliothécaire au Sénat, il collabore à diverses revues puis rédige les chroniques littéraires du journal "Temps", de 1866 à 1893.
Anatole France acquiert la notoriété avec "Le crime de Sylvestre Bonnard" (1881). Au fil des ans, il s'intéresse de plus en plus aux problèmes politiques. Avec son ami Emile Zola, il signe la pétition des intellectuels en faveur d'Alfred Dreyfus. Dans "Histoire contemporaine", il décrit de manière très fine les problèmes de son temps tels qu'il les perçoit en animant le Salon de Mme de Caillavet, son égérie. "L'île des pingouins" (1908) est une vive critique des professionnels de la politique. Il publie également des romans historiques : "Les dieux ont soif" (1912), "Le petit Pierre" (1918).
Son œuvre littéraire est plus classique, moins progressiste que ses engagements politiques et humanistes. Mais son sens de la formule est aiguë ("On croit mourir pour la patrie et on meurt pour des industriels"). Son scepticisme et son ironie transparaissent à travers ses romans où il dépeint un monde que le fanatisme rend cruel.
Il est élu à l'Académie Française en 1896 et reçoit le Prix Nobel de littérature en 1921.
Principales oeuvres :
- Alfred de Vigny (essai, 1868),
- Poèmes dorés (1873),
- Le crime de Sylvestre Bonnard (1881),
- Balthazar (1889),
- Thaïs (1890),
- La rôtisserie de la Reine Pédauque (1893),
- Le lys rouge (1894),
- Le jardin d'Epicure (1894),
- L'orme du mail (1897),
- Histoire contemporaine (4 volume de 1897 à 1901),
- L'affaire Crainquebille (1903),
- L'Eglise et la République (1905),
- L'île des pingouins (1908),
- Les dieux ont soif (1912),
- La révolte des anges (1914),
- Le petit Pierre (1918)