« L’Inde secouée par une fraude bancaire géante !! »

L'affaire de la Punjab National Bank, cible d'une fraude de 1,8 milliard de dollars, braque le projecteur sur la corruption au sein du système bancaire public et du secteur diamantaire en Inde.
Il faisait régulièrement la une des magazines de mode, et ses diamants paraient les plus grandes actrices. Mais s'il est aujourd'hui au centre des médias, les raisons en sont nettement moins glamours. Nirav Modi, célèbre patron de Gitanjali Gems, enseigne de bijoux réputée en Inde , est accusé d'être l'auteur d'une des plus grandes fraudes bancaires qu'ait jamais connues le pays.
Le célèbre diamantaire se serait enfui en laissant derrière lui une ardoise de près de 1,8 milliard de dollars à la Punjab National Bank (PNB), l a deuxième banque publique du pays . Une escroquerie à laquelle State Bank of India (SBI) et l'Union Bank of India seraient également exposées à hauteur de plus de 200 millions de dollars chacune. « Nous n'avons pas d'exposition directe à Nirav Modi, mais à la banque PNB », a détaillé le président de la SBI.
Repéré dans un hôtel de luxe new-yorkais ce week-end, Nirav Modi aurait quitté le pays le 1erjanvier - en même temps que son frère, de nationalité belge, sa femme, qui est américaine, et son partenaire en affaires, Mehul Choksi, qui l'aurait suivi de quelques jours. Lui et son associé auraient donc pris les devants avant que leur forfait ne parvienne le 29 janvier sur le bureau de la CBI, la plus grande agence d'investigation du pays.
Révélée par le manager de la PNB chargé de la filiale de Bombay, l'affaire repose sur le fait que des responsables aient fourni des lettres de crédit aux sociétés de Nirav Modi, et ce, sans suivre les procédures habituelles. Ces lettres qui font office de garantie auprès des banques internationales - dans ce cas, les filiales d'Union Bank of India, Allahabad Bank et Axis Bank à Hong Kong - ont permis au groupe d'obtenir des prêts en vue de financer l'importation de diamants.
Accusés d'avoir été à la manoeuvre, trois responsables de la PNB ont été arrêtés samedi et transférés à la police jusqu'au 3 mars. Ces derniers auraient omis d'entrer les lettres de crédit dans le système de la banque en vue d'éviter les détections.
Un banquier arrêté toutes les 4 heures
Inédite de par son montant, cette affaire est, dans les faits, loin d'être isolée. Selon la banque centrale indienne , en moyenne, un banquier au moins serait arrêté toutes les 4 heures pour implication dans une fraude. Entre 2015 et mars 2017, 5.200 fonctionnaires du secteur bancaire ont ainsi été pris la main dans le sac. « Ces employés ont été condamnés, sanctionnés et licenciés de leur service », indique la banque centrale.

Mais ces arrestations ne suffiront sans doute pas à changer la donne. « On s'attaque à Nirav Modi, un gros poisson, mais cette affaire ne fait que rappeler que chaque entrepreneur, s'il veut obtenir un prêt de la banque publique, est obligé de donner un pot-de-vin », dénonce un homme d'affaires indien. Cette fraude relance par ailleurs les enquêtes de la SEBI (le régulateur des marchés financiers) sur le secteur diamantaire, réputé pour laver l'argent sale et pour ses liens avec les courtiers.
Dans le cas de Nirav Modi, pas moins de 200 sociétés écrans ont été dénombrées pour recevoir les fonds de la fraude et les blanchir sous forme de terrains, or et autres pierres précieuses. Ses 29 propriétés et 105 comptes bancaires ont été gelés. Son passeport a été suspendu. La justice indienne n'attend plus qu'il daigne rentrer...
Marjorie Cessac
Source : lesechos.fr