La rapine financière du siècle : l’appropriation des fonds souverains libyens |
L’objectif de la guerre en Libye n’est pas seulement le pétrole, dont les réserves (estimées à 60 milliards de barils) sont les plus grosses d’Afrique et les coûts d’extraction parmi les plus bas du monde, ni le gaz naturel dont les réserves sont estimées à environ 1.500 milliards de m3. Dans le viseur des « volontaires » de l’opération « Protecteur unifié » il y a aussi les fonds souverains, les capitaux que l’Etat libyen a investis à l’étranger.
En Italie les principaux investissements libyens sont ceux effectués dans UniCredit Banca (dont Lia et la Banque centrale libyenne possèdent 7,5%), dans Finmeccanica (2%) et Eni (1%) : ces investissements et d’autres (dont 7,5% au Juventus Football Club) ont une signification plus politique qu’économique (ils se montent à environ 4 milliards de dollars). La Libye, après que Washington l’ait effacée de sa liste de proscription des « Etats voyous », a essayé de se refaire une place à un niveau international en misant sur la « diplomatie des fonds souverains ». Quand les Etats-Unis et l’Union européenne ont révoqué leur embargo de 2004 et les grandes compagnies pétrolières sont revenues dans le pays, Tripoli a pu disposer d’un surplus commercial d’environ 30 milliards de dollars annuels qu’il a destiné en grande partie aux investissements étrangers. La gestion des fonds souverains a cependant créé un nouveau mécanisme de pouvoir et corruption, aux mains de ministres et hauts fonctionnaires, qui a probablement échappé au contrôle de Kadhafi lui-même : confirmé par le fait qu’en 2009, ce dernier a proposé que les 30 milliards de dividendes pétroliers allassent « directement au peuple libyen ». Ceci a accentué les fractures à l’intérieur du gouvernement libyen.
L’assaut sur les fonds libyens aura un impact particulièrement fort en Afrique. Ici, la Libyan Arab African Investment Company a effectué des investissements dans plus de 25 pays, dont 22 en Afrique sub-saharienne, en programmant de les augmenter dans les cinq prochaines années, surtout dans les secteurs minier, manufacturier, touristique et dans celui des télécommunications. Les investissements libyens ont été décisifs dans la réalisation du premier satellite de télécommunications de la Rascom (Regional African Satellite Communications Organization) qui, mis en orbite en août 2010, permet aux pays africains de commencer à se rendre indépendants des réseaux satellitaires étasuniens et européens, en réalisant ainsi une économie annuelle de centaines de millions de dollars. Plus importants encore ont été les investissements libyens dans la réalisation des trois organismes financiers lancés par l’Union africaine : la Banque africaine d’investissement, dont le siège est à Tripoli; le Fond monétaire africain, siége à Yaoundé (Cameroun); la Banque centrale africaine, siège à Abuja (Nigeria). Le développement de ces organismes permettrait aux pays africains d’échapper au contrôle de la Banque mondiale et du Fond monétaire international et marquerait la fin du franc Cfa, la monnaie que sont obligés d’utiliser 14 pays, ex-colonies françaises. Le gel des fonds libyens assène un coup très dur à tout le projet. Les armes utilisées par les « volontaires » ne sont pas seulement celles de l’opération « Protecteur unifié ».... Source : ilmanifesto.it du 22 avril 2011 par Par Manlio Dinucci Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in edicola/manip2n1/20110422/manip2pg/09/manip2pz/301857/
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L’assaut sur les fonds libyens
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