L’enquête «Karachi» s’approche dangereusement de Sarkozy

Deux amis du président français ont été placés en garde à vue. Dans le viseur du juge d’instruction  Renaud van Ruymbeke : le financement de Balladur via la Suisse.

Alors que la France commence à vivre au rythme de l’élection présidentielle de 2012, l’enquête «Karachi» s’approche dangereusement du président Sarkozy. Deux de ses amis sont visés par le juge d’instruction Renaud van Ruymbeke.

 Nicolas Bazire a été interpellé par les policiers de la Division nationale des investigations financières, mercredi matin à Paris, pour être placé en garde à vue. Son bureau et son domicile ont été perquisitionnés. Numéro 2 du groupe LVMH, ancien directeur du cabinet d’Edouard Balladur, Bazire est un intime de Nicolas Sarkozy dont il fut le témoin de son mariage avec Carla Bruni. Quant à Thierry Gaubert, il est sorti mercredi des locaux de la police financière à Paris après 48 heures de garde à vue, afin d’y être présenté au juge van Ruymbeke. Dans la soirée, il a été mis en examen par ce magistrat. Gaubert a été l’un des plus proches conseillers de Sarkozy, à la mairie de Neuilly, puis au ministère des Finances.

 L’enquête «Karachi» a démarré à la suite de l’attentat qui a frappé des Français dans la capitale du Pakistan. Une hypothèse est actuellement examinée par les enquêteurs: cet acte aurait pour mobile la cessation, sur ordre du président Chirac, du versement de commissions aux intermédiaires qui avaient permis à la France de conclure des contrats de vente d’armement au Pakistan. Or, une partie de ces commissions (appelée rétrocommissions) serait retournée en France pour tomber dans l’escarcelle d’Edouard Balladur qui, en 1995, avait brigué la présidence de la République en s’opposant à Jacques Chirac. Nicolas Sarkozy était alors le bras droit de Balladur, premier ministre.

 L’intermédiaire Ziad Takieddine tient un rôle central dans ces relations franco-pakistanaises, ce qu’il nie. Or, l’ex-femme de Thierry Gaubert — la princesse Hélène de Yougoslavie dont le mariage avait été célébré en 1988 par le maire de Neuilly Nicolas Sarkozy — affirme que Gaubert et Takieddine se sont rendus dans des banques suisses en 1994 et 1995 afin d’y retirer«des valises volumineuses de billets». Ces fonds auraient été ensuite réceptionnés par Nicolas Bazire, qui dirigeait la campagne de Balladur.

 Tous ces protagonistes contestent ce témoignage. Mais ils devront s’expliquer — y compris Edouard Balladur à en croire l’avocat des familles victimes de l’attentat — sur les quinze millions de francs français versés en grosses coupures de 500 FF dont les enquêteurs ont retrouvé la trace. Il est peu probable que de telles coupures fussent récoltées dans des meetings.

J-N  Cuénod correspondant de tdg - 21.09.2011