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La France s’enfonce dans une crise sociale majeure

Publié par medisma sur 24 Septembre 2012, 20:18pm

Catégories : #lintegral

filpac7e.pngTous les indicateurs disponibles l’attestent : la France est en train de s’enfoncer dans une crise sociale majeure. Mois après mois, les statistiques du chômage en portent témoignage. Une étude récente de l’Insee sur l’envolée de la pauvreté est venue récemment confirmer cette tendance. Et voici qu’une nouvelle prévision complète ce tableau sinistre : le pouvoir d’achat des Français va accuser en 2012 et 2013 une baisse spectaculaire, sans précédent dans l’histoire économique récente du pays, de l’ordre de – 1,2 % au cours de chacune de ces deux années. Ce qui soulève d’innombrables questions sur la pertinence de la politique économique d’austérité actuellement suivie par le gouvernement socialiste.

Déjà au début de l’été, dans sa traditionnelle note de conjoncture, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) avait sonné le tocsin en donnant des prévisions alarmistes sur l’évolution probable du pouvoir d’achat (lire La triple faute de François Hollande). L’Insee, dont les prévisions ne dépassent jamais l’horizon du semestre suivant, relevait ainsi une tendance majeure : le pouvoir d’achat du revenu disponible brut des ménages devrait baisser de – 0,6 % sur l’ensemble de l’année 2012, après des hausses modestes de + 0,9 % en 2010 et + 0,5 % en 2011. Ce chiffre de – 0,6 % était déjà considérable.

Encore faut-il bien mesurer que cet indicateur du pouvoir d’achat du revenu disponible brut des ménages, le plus fréquemment utilisé dans les débats économiques, est trompeur car il n’est pas corrigé par les évolutions démographiques. Pour donner un indicateur qui se rapproche plus du « ressenti » des Français, l’Insee calcule donc un autre indicateur, hors évolutions démographiques, celui du pouvoir d’achat par unité de consommation. Et dans ce cas, l’effondrement annoncé en juin par l’Insee était encore plus spectaculaire : comme l’établit le tableau ci-dessous, le pouvoir d’achat par unité de consommation devrait s’effondrer de – 1,2 % en 2012, après – 0,1 % en 2011 et + 0,2 % en 2010. Cette baisse de – 1,2 % est sans précédent depuis 1984.

 

Selon d’autres calculs faits à l’époque par l’Insee, la baisse serait de 1,1 % par habitant et de 1,6 % par ménage. Du jamais vu, depuis plusieurs décennies.

Or, deux instituts se sont appliqués à prolonger les courbes très inquiétantes de l’Insee. Il s’agit du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) et de l’institut Pair Conseil, qui regroupe des anciens du Bureau d’informations et de prévisions économiques (Bipe). Selon la prévision de ces deux instituts – on peut la télécharger ici –, la tendance relevée par l’Insee se maintiendrait en 2013. Au total, la France serait donc en train de traverser l’une des périodes les plus graves de son histoire récente en matière de pouvoir d’achat.

 

 

Des différentes mesures du pouvoir d’achat dont se sert l’Insee, cette prévision retient donc celle qui est la plus proche du ressenti des ménages : il s’agit du pouvoir d’achat par ménage. Concrètement, le tableau révèle que ce pouvoir d’achat par ménage a baissé de – 0,2 % en 2010 et de – 0,5 % en 2011 et devrait poursuivre son effondrement, avec une chute de – 1,2 % en 2012, puis à nouveau – 1,2 % en 2013.

Explication des deux instituts : « En 2012 et particulièrement en 2013, le revenu des ménages sera impacté par les hausses d’impôts, les faibles revalorisations des prestations sociales (retraites, allocations familiales) et la pression sur les revenus d’activité. En effet, dans le climat quasi récessif de l’économie en l’absence d’inflexion à la politique d’austérité budgétaire menée en Europe, l’emploi restera à la peine et le chômage poursuivra sa hausse pour s’établir à un taux proche de 11 % fin 2013. Avec des pressions inflationnistes domestiques faibles (tensions sur le marché du travail, salaires atones, faiblesse de la demande), l’inflation des prix à la consommation devrait donc légèrement freiner, sous l’hypothèse d’une accalmie progressive des prix de l’or noir. Malgré cela, la faiblesse des revenus après impôts ne permettrait pas au pouvoir d’achat par ménage de résister : il reculerait à nouveau sur 2012-2013. »

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Débat sur la pertinence du cap économique

Cette statistique vient donc confirmer la très violente dégradation de la conjoncture sociale que vit la France, du fait de la crise économique historique mais tout autant de l’accumulation des politiques d’austérité conduites en Europe et notamment dans notre pays.

Cette conjoncture sociale, Mediapart en avait récemment dessiné les contours (lire Vers les 10 millions de pauvres et les 5 millions de chômeurs). Selon une étude récente de l’Insee sur les niveaux de vie, s'appuyant sur les dernières données disponibles, celles de 2010, il apparaît ainsi que le revenu médian des Français a été seulement de 1 610 euros par mois. Ce seul chiffre donne la mesure des souffrances sociales du pays puisque un Français sur deux a un niveau de vie inférieur à ce seuil, qui est très faible. À titre d’indication, le Smic mensuel net est de 1 118 euros depuis début juillet.

Le niveau de vie des Français a donc baissé en 2010. Après avoir progressé de + 1,7 % par an en moyenne entre 2004 et 2008, ce niveau de vie a seulement augmenté de + 0,4 % en 2009, puis a baissé de – 0,5 % l'année suivante, en euros constants. Sous les effets de la crise et de la politique économique conduite par Nicolas Sarkozy à l’époque, les Français ont connu des difficultés croissantes de pouvoir d’achat. Et l’Insee prend bien soin de préciser – la tendance est nouvelle – que toutes les catégories de Français ont été concernées par une baisse ou une stagnation, à l’exception notable des plus riches. « À contre-courant du reste de la population, le niveau de vie au-dessus duquel se situent les 5 % de personnes les plus aisées repart à la hausse (+ 1,3 % en euros constants) », constate l'institut.

Ainsi les statistiques de Pair Conseil et du Crédoc suggèrent que cette tendance constatée en 2010 s’est vraisemblablement prolongée et même aggravée depuis.

Cette même étude sur les niveaux de vie faisait apparaître une hausse spectaculaire de la pauvreté.

De 7,8 millions de pauvres en 2008, on est passé à presque 8,2 millions en 2009 et plus de 8,6 millions en 2010. Depuis que la crise a commencé, le nombre de pauvres augmente bon an mal an de près de 400 000. Ce qui fait naturellement froid dans le dos. Or, comme la crise depuis s’est encore creusée, il coule de source, là encore, que ces gravissimes évolutions ont dû se poursuivre en 2011 et 2012. Dans l’hypothèse basse d’une augmentation de 400 000 du nombre de pauvres par an, on pourrait donc atteindre 9,4 millions de pauvres fin 2012. CQFD ! La France se rapproche de la barre fatidique des 10 millions de pauvres.

Et si c’est le cas, c’est d’abord parce que le nombre des demandeurs d’emplois lui-même s’envole. Au-delà de ce que le gouvernement admet lui-même ! Le plus souvent, ce dernier ne communique en effet que sur la catégorie la plus restreinte des demandeurs d’emplois, ceux de la catégorie A, qui sont en recherche d’emploi et n’ont eu aucune activité. Soit, désormais, 3 millions de personnes. Mais si l’on agrège toutes les catégories, le tableau est beaucoup plus sombre : le nombre des demandeurs d’emploi a, depuis l’été, franchi la barre des 5 millions.

 

Un pouvoir d’achat qui s’effondre, un chômage qui s’envole, une pauvreté qui se répand dans tout le pays : c’est bel et bien une crise sociale historique que traverse le pays.

À la lecture de toutes ces statistiques, plus déprimantes les unes que les autres, on ne peut donc s’empêcher de se poser la question : la politique économique du gouvernement socialiste est-elle la bonne ? A-t-elle été calibrée pour réduire des fractures sociales de plus en plus béantes ? À quelques petites mesures près, comme la revalorisation de la rentrée scolaire, il est difficile de le prétendre. On peut même craindre le contraire : la politique budgétaire d’austérité, avec la politique salariale restrictive qui en découle, risque à l’inverse de creuser un peu plus la récession. Et d’accroître la crise sociale qui mine ce pays…

LAURENT MAUDUIT / MEDIAPART

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