Lorsque
Barack Obama insistait sur la nécessité d'adopter son plan de relance en février dernier, il prétendait que seule une action gouvernementale décisive pourrait empêcher l'économie de sombrer dans
une profonde dépression. Il ne faisait ainsi que répéter l’idée commune selon laquelle les marchés ne peuvent s'auto-corriger – sauf à très long
terme – et l'intervention de l'État est nécessaire pour relancer l'activité économique.
La théorie économique peut nous expliquer pourquoi ces affirmations sont incorrectes en dépit de l'apparence de prospérité que ces mesures interventionnistes peuvent produire. En effet, les plans
de relance n’enfantent que plus de dommage et mènent à une correction plus sévère à plus ou moins long terme.
Toutefois, si nous nous fions au témoignage de l'histoire et en particulier à la dépression de 1920-21, dont la plupart des gens n'ont jamais entendu parler, nous relèverons l’exemple par
excellence d'un retour à la prospérité, et ce en l'absence de plan de relance gouvernemental, et même avec des mesures tout à fait
contraires.....
Pendant la Première Guerre mondiale et la période qui l'a suivie, la Réserve fédérale avait substantiellement augmenté la quantité de monnaie dans l'économie. Lorsque la Fed décida finalement de
hausser le taux d'escompte – le taux auquel elle prête aux banques – l'économie ralentit et commença à se réajuster à la réalité.
Vers le milieu de l'année 1920, le ralentissement avait atteint un niveau critique, la production diminuant de 21% au cours des douze mois suivants. Le nombre de chômeurs augmenta de 2,1 millions
en 1920 à 4,9 millions en 1921.
Warren G. Harding affirma lors de son discours d'investiture
républicaine à la présidence en: « J'ignorerais les responsabilités qui m'incombent en cette heure fatidique si je n'avertissais pas les salariés américains que des salaires de plus en plus
élevés et une production déclinante ne peuvent que nous mener à la ruine industrielle et économique. » Il expliqua dans un autre contexte que les salaires, comme les prix, devraient diminuer
pour s'ajuster à la réalité économique de l'après-bulle.
Harding condamna tout autant l'inflation: « Une augmentation grossière de la quantité de monnaie et de crédit ont entraîné une dépréciation du dollar de la même façon que la création
monétaire et l'inflation ont discrédité les autres monnaies du monde. Nous avons gonflé la monnaie sans réfléchir, nous devons la dégonfler de manière mûrement réfléchie. Nous avons dévalué le
dollar par des mesures financières irresponsables, nous devons le rétablir de façon honnête. »
Au lieu de promettre de dépenser des sommes sans précédent, il en appela à une réduction des dépenses:
Nous tenterons de procéder à une déflation intelligente et courageuse, nous mettrons un terme aux emprunts gouvernementaux qui empirent la situation, et nous nous attaquerons aux coûts élevés des mesures étatiques avec toute l'énergie et la compétence dont les républicains sont capables. Nous promettons ce soulagement qui découlera de la fin du gaspillage et de l'extravagance, ainsi que du renouveau des pratiques de frugalité publique, non seulement dans le but de diminuer le fardeau fiscal, mais aussi parce que cela constituera un exemple pour stimuler l'épargne et la prudence économique dans la vie privée.
Harding expliqua lors de son discours de l'année suivante que l'économie « avait subi les chocs et secousses associés à une demande anormalement élevée, à l'inflation du crédit et à une explosion des prix ». Le pays traversait maintenant l'ajustement inévitable. Aucun raccourci facile n'était possible:
Les souffrances ne seront pas toutes légères, ni également réparties. Il est impossible de faire en sorte qu'elles le soient. Il n'y a pas de passage instantané du désordre vers l'ordre. Nous devons confronter cette réalité difficile, accepter nos pertes et repartir sur une nouvelle lancée. C'est la plus vieille leçon qu'offre la civilisation. Aucun système nouveau ne permet de faire de miracle. Toute expérimentation extravagante ne fera qu'ajouter à la confusion. Notre meilleure garantie de réussite tient à l'administration efficace d'un système qui a fait ses preuves.
Harding tint parole en poursuivant les réductions budgétaires qui avaient débuté durant les derniers mois de l'administration Wilson, alors que la maladie de celui-ci l'avait rendu incapable de
gouverner. Les dépenses fédérales diminuèrent de 6,3 milliards $ en 1920 à 5 milliards $ en 1921 et à 3,3 milliards $ en 1922. Entre-temps, les taux d'imposition
furent réduits – à tous les niveaux de revenu. Et au cours des années 1920, la dette nationale fut réduite du tiers.
Par opposition au Japon, qui s'engagea durant les années 1920 dans une série d'interventions étatiques massives qui paralysèrent son économie et contribuèrent à une grave crise bancaire sept ans
plus tard, les États-Unis permirent à leur économie de s'ajuster. En 1920-21, nota l'économiste Benjamin Anderson,
Nous avons encaissé nos pertes, ajusté notre structure financière, enduré notre dépression, et en août 1921 nous avons repris la route de la croissance. La reprise de la production et de l'emploi qui s'est enclenchée en août 1921 s'appuyait sur une base solide suite à une restructuration en profondeur de nos problèmes de crédit, une réduction draconienne des coûts de production et le libre jeu de l'entreprise privée. Elle ne découlait pas de politiques gouvernementales visant à supporter les entreprises.
Le lecteur a probablement remarqué que les recommandations et les décisions de Harding sont exactement à l'opposé des idées reçues qu'on retrouve dans les cercles politiques et médiatiques de nos jours.
C'est justement parce qu'on n'a pas adopté de mesures de relance monétaires et fiscales qu'un progrès économique solide a été rendu possible.
Car le concept de relance monétaire et fiscale lui-même se fonde sur un diagnostic erroné des causes de la dépression économique, ce qui mène à l'application des mauvais remèdes. Le problème ne
vient pas d'un niveau de dépense inadéquat, mais plutôt du fait qu'à la suite d'une période de surchauffe provoquée par l'intervention de la banque centrale, la structure des investissements ne
correspond pas à la demande des consommateurs. La récession est la période pendant laquelle on corrige ces incohérences en réallouant le capital dans des processus de production plus appropriés.
Les plans de relance monétaires et fiscaux n'ont pour effet que d'entraver et de ralentir ce processus purgatoire, exit Barak Obama.
Harding comprenait bien ceci, ce qui n'est pas le cas de la classe politique qui nous gouverne aujourd'hui. Le président qu'on nous apprend à détester le plus au 20e siècle a mené les États-Unis
à bon port durant une période de tempête bien pire que celle que nous vivons en ce moment, simplement en laissant le libre marché faire les ajustements nécessaires. Et Harding, comme ses
déclarations le prouvent, n'a pas adopté ce type de politique simplement par inertie ou parce qu'il était incapable de concevoir des approches alternatives. Ce personnage méprisé était en fait un
bien meilleur économiste que la plupart des génies qui prétendent pouvoir nous instruire sur le sujet aujourd'hui.
Peu de présidents américains sont aussi impopulaires que Harding parmi les historiens. Il est habituellement décrit comme une andouille qui s'est retrouvé par erreur à la présidence. Et pourtant,
quels que soient ses défauts intellectuels – et plusieurs chercheurs ont récemment admis qu'ils avaient été absurdement exagérés – ainsi que les faiblesses morales qui l'affligeaient, il
comprenait les principes fondamentaux des bulles, des krach et de la reprise mieux que n'importe quel autre président au 20e siècle. [...]
Article
réadapté de Thomas E. Woods Jr. : Chercheur associé à l'Institut Mises et auteur, notamment, de Meltdown.