Extrait du rapport Cyclope 2017
Afrique du Nord et Moyen-Orient :
Déserts d’avenir, territoires abandonnés et stratégies infertiles
L’État stratégique du sud de la Méditerranée et du Moyen-Orient reste caractérisé par son immuable vulnérabilité. Cette zone, instable et imprévisible, demeure l’un des principaux épicentres de la géopolitique mondiale. Il est difficile d’y repérer des signaux d’espoirs et d’identifier des progrès en matière de développement, de démocratisation et de coopération entre les Nations. Climatiquement sèche et composée de nombreux territoires arides, la région peut être analysée à travers les dynamiques sémantiques que propose la notion de désert. Brûlante d’actualité, la région est bien plus fertile en violences qu’en espérances. Au sud de la Méditerranée et au Moyen-Orient, vivre dans la dignité et en liberté s’avère peu possible actuellement. Les contextes sociopolitiques se révèlent pour la plupart verrouillés, pour ne pas dire stériles vis-à-vis des futurs à construire. Un petit tour d’horizons prospectifs est ici proposé à propos de cette vaste diagonale stratégique qui s’étend des montagnes de l’Atlas au plateau iranien, en passant par les poudrières du Sahel et du Proche-Orient.
Déserts de paix
L’ancrage territorial de l’État islamique (EI), également connu par son acronyme arabe de Daesh, est essentiellement désertique, entre le sud-est de la Syrie et le nord-ouest de l’Irak. Sa superficie s’est réduite significativement au cours des derniers mois, avec la pression exercée par les bombardements de la coalition internationale et ceux plus intensifs de la Russie, bien décidée à soutenir le régime syrien alaouite dans sa reconquête géographique. Alors que la militarisation croissante du conflit syrien s’est poursuivie en 2016, les derniers mois ont été caractérisés par le recul de l’EI et la reprise en main de plusieurs sites stratégiques par le pouvoir de Damas, à commencer par Alep, tandis que Mossoul pourrait prochainement être libérée par les forces irakiennes et kurdes. La perte de ces deux villes affaiblit l’EI, contraint de se redéployer dans des territoires arides et ruraux, plus exposés aux images satellitaires et à la rareté de l’eau. Cela ne signifie pas pour autant qu’il soit éradiqué, d’autant plus que sa survivance peut passer par ce cyber-califat qu’il érige et qui menace la sécurité d’un espace géographique bien plus vaste. De grandes incertitudes planent au-dessus de la Syrie : ce pays, dont la guerre civile depuis 2011 a déjà provoqué la mort de 300 000 personnes et l’exil de plus de 10 millions d’individus, va-t-il continuer à se désagréger ? L’EI va-t-il conserver durablement le contrôle de parcelles territoriales à cheval entre la Syrie et l’Irak ? Existe-t-il une puissance suffisamment forte pour imposer une sortie de crise ou est-ce au contraire l’imbroglio d’ambitions géopolitiques incompatibles qui rendra la Syrie orpheline de perspectives favorables à la paix ?
L’Irak fait du surplace dans sa reconstruction. L’unité du pays est un leurre, que le retrait bâclé des forces américaines en 2011 est venu confirmer. Depuis la fin du régime baasiste en 2003, l’Irak vit au rythme de violences interconfessionnelles et de confrontations armées localisées. Les habitants des grandes villes, à commencer par ceux de Bagdad, s’emmurent dans des quartiers scrupuleusement délimités. Aucune pratique démocratique ne s’imprime dans les faits et l’idée de nation irakienne vole en éclats au fil des mois. Entre les antagonismes des chiites et des sunnites se sont faufilés des mouvements djihadistes se ralliant à la cause de l’EI. Si celui-ci perd du terrain en Irak depuis quelques mois, il n’est pas pour autant battu et pourrait renaître du désert. Beaucoup de paramè- tres évolueront en fonction du succès ou de l’échec de la libération de Mossoul. Les tensions communautaires pourraient s’accentuer, surtout si les puissances extérieures opérant en Irak favorisent volontairement un processus de partition territoriale de facto face au vide de pouvoir de l’État central. Les déchirures irakiennes devraient également s’aggraver à mesure que s’affirment les capacités de développement d’un Kurdistan indépendant au nord du pays.
La Libye n’avance guère vers plus de stabilité. Au contraire, le chaos continue de régner sur le pays, avec d’incessantes luttes territoriales et de clans revendiquant le droit d’accès aux ressources énergétiques du pays. En outre, des combattants de l’EI continuent à essaimer sur plusieurs zones et leur contingent pourrait augmenter avec les difficultés rencontrées en Syrie ou en Irak. Politiquement aussi, c’est toujours le désordre. Le gouvernement d’union nationale de Faïez Sarraj, soutenu par l’ONU dans le cadre du processus établi fin 2015 avec l’accord de Skhirat, sombre déjà en déliquescence, face aux partisans de Khalifa Al-Ghwell, leader d’une dynamique concurrente, dite de salut national, majoritairement composée de forces islamistes, et émanant du mouvement Aube de la Libye qui, de 2014 à 2016, contrôlait la Tripolitaine. À cela s’ajoute la grande latitude de Khalifa Haftar, maître de la Cyrénaïque,
Au fil de l’année… 15 décembre 2016
C’était à l’été 1972, il y a donc quarante-deux ans. De jeunes Français, sac à dos, découvraient le Moyen-Orient : Damas, Hama, Palmyre et puis Alep : Alep, la ville de tous les rêves, au carrefour de l’Orient des croisés et celui de l’Islam, Alep et ses fabuleux souks, les plus beaux qu’il n’ait été permis de découvrir au pied de la vieille citadelle. Alep et son carrefour de civilisations où coexistaient encore chrétiens, Arméniens, Kurdes et bien d’autres… De tout cela, il ne reste rien et pour reprendre l’expression d’un journaliste du New York Times, Alep n’est plus qu’un champ de ruines comme « Dresde en 1945 ». La ville est tombée : les troupes gouvernementales, mais surtout les bataillons libanais du Hezbollah, afghans et russes et puis surtout le pilonnage de l’aviation russe, comme autrefois à Grozny, sont parvenus à leur fin pour un bilan humain que l’on peine à mesurer. La soi-disant « communauté internationale » n’a rien fait se heurtant à l’ONU aux vétos indien et chinois (sans parler des Russes) et puis surtout aux lâchetés des dirigeants occidentaux à commencer par un Barack Obama dont Alep sera l’ultime tâche sur un bilan déjà si médiocre.
Dresde 1945, ou plutôt Varsovie 1944, lorsque les troupes soviétiques restèrent l’arme au pied pour laisser le temps aux Allemands de liquider l’insurrection polonaise afin de préparer le terrain pour la prise de pouvoir par les communistes. De Staline à Poutine, reconnaissons au moins une certaine continuité dans la stratégie « russe ».
qui n’a jamais voulu reconnaître le gouvernement d’union nationale et qui s’oppose depuis toujours aux groupes islamistes qui cherchent à s’emparer du pouvoir en Libye depuis la chute du colonel Khadafi en 2011. Les Russes, qui viennent de rentrer dans le débat libyen de façon officielle, ont manifesté leur soutien à Khalifa Haftar. Ce sont là peut-être les prémices d’une action déterminée de sa part pour conquérir militairement tout le pouvoir dans le pays ? Pendant ce temps, la population s’impatiente des problèmes rencontrés dans la vie quotidienne : insécurités permanentes sur les routes, pénuries électriques ou hydriques, banques en déroute et climat des affaires économiques épouvantable. Désertique, la Libye va-t-elle aussi devenir de plus en plus sauvage ?
Le Yémen, pays le plus pauvre du monde arabe, ne doit pas échapper aux écrans radars de l’analyse stratégique. Si le conflit en Syrie témoigne des jeux de puissance entre un grand nombre d’acteurs et polarise les regards dans la zone moyen-orientale, la guerre qui sévit au Yémen n’en est pas moins meurtrière et géopolitique. Cela fait plus de deux ans que le conflit perdure, engendrant des milliers de victimes et une fragmentation territoriale d’une intense complexité. Mettant aux prises les rebelles chiites houthis et les forces de la coalition saoudienne, la guerre fait rage sur fond de rivalités régionales entre Téhéran et Ryad. Beaucoup d’observateurs indiquent que les groupes locaux soutenus par l’Arabie Saoudite, elle-même directement engagée dans des frappes aériennes incessantes, sont également armés par les États-Unis, la Grande-Bretagne et même la France, dans le cadre de la vaste lutte contre le terrorisme islamiste. La confusion domine en dépit des tentatives de négociations pour résoudre le conflit. Les trêves humanitaires ne sont jamais respectées et la solution militaire envisagée par les Saoudiens piétine. En outre, la fragilité du détroit de Bab el-Mandeb, reliant la mer Rouge à l’océan Indien et par lequel transite une partie du trafic maritime mondial, s’accentue dangereusement, ajoutant ainsi une composante géoéconomique non négligeable à cette équation yéménite à plusieurs inconnues.
Enfin, trois zones désertiques demeurent éminemment stratégiques. Premièrement, le Sinaï, péninsule triangulaire de moins en moins contrôlée par l’Égypte où de nombreux partisans des Frères musulmans ou de l’EI ont trouvé refuge. Cela inquiète les autorités israéliennes, déjà à cran avec la bande de Gaza située au nord du Sinaï, mais également Le Caire qui se préoccupe de l’évolution dans ce territoire où il lui faut à la fois contrer l’exportation des violences et bunkeriser les sites touristiques de Taba et de Charm el-Cheick. Deuxièmement, le Sahara occidental, enclavé entre le Maroc, la Mauritanie et l’Algérie, et dont le statut politique est indéfini depuis quarante ans. La mort en mai 2016 de Mohamed Abdelaziz, leader historique du Front Polisario, mouvement indépendantiste qui plaide pour une République arabe sahraouie démocratique (RASD), relance l’attention sur le devenir de ce territoire dont le Maroc contrôle toujours 80 % et n’entend en aucun cas se séparer, et qui, par ailleurs, constitue l’épine dorsale de la désunion maghrébine. Il n’est pas étonnant que les communautés fragiles du Sahara occidental soient convoitées par certains groupes djihadistes déployés dans la bande du Sahel, autre zone désertique dont les convulsions sociopolitiques seront probablement de plus en plus fréquentes.
Déserts d’avenir
Dans la région, les déserts sont nombreux. Il s’y trouve également de véritables pannes politiques vis-à-vis des futurs à construire. De tels « déserts d’avenir » frappent plusieurs sociétés. Cela concerne bien entendu celles des pays examinés précédemment, mais trois cas spécifiques se distinguent par ailleurs.
L’Égypte se situe-t-elle à l’aube d’une nouvelle révolution ? Trois ans après s’être emparée du pouvoir, en chassant les Frères musulmans par la force et avec le soutien d’une partie importante du pays, l’armée peine à concrétiser ses promesses de croissance économique et de plus de transparence politique. La crédibilité du maréchal Al-Sissi, qui préside le pays depuis 2014, est déjà entamée. Les droits civiques, déjà limités, sont souvent bafoués. La jeunesse, souvent suspecte aux yeux du pouvoir, bouillonne d’impatience. Les habitants des zones rurales, rarement considérés comme prioritaires, vivent à l’écart du développement. Les attentats, dont ceux contre la minorité chrétienne copte, ne se réduisent pas. Parallèlement, le refroidissement avec les parrains du Golfe accélère le passage dans le rouge de l’économie égyptienne, obligeant le pouvoir à faire appel aux prêts du Fonds Monétaire International (FMI). Ce marasme économique s’est traduit par l’adoption d’un régime de change flottant, une dévaluation monétaire de près de 50 % en novembre 2016, et depuis, une inflation de l’ordre de 20 % qui pénalise les couches pauvres d’un pays où d’ores et déjà le quart de la population est dépendant des filets de sécurité sociaux. La pénurie de médicaments et de certaines denrées alimentaires, comme le sucre, suscite de fortes interrogations au sein de la société égyptienne, qui est également consciente de l’envolée des dépenses militaires et de l’échec financier enregistré pour le moment avec l’élargissement du canal de Suez dont le trafic de navires stagne. En 2016, le tourisme, l’une des principales sources d’entrée de devises autrefois, mais en berne depuis 2011, s’est contracté de 30 % supplémentaires. Le retour des turbulences face à l’absence de perspectives : telle semble malheureusement être la dynamique sociopolitique qui attend l’Égypte.
En Algérie, là aussi, le bruit de la rue face aux blocages du régime se discerne de plus en plus. Le crépuscule de la présidence Bouteflika augure une période de fortes agitations populaires dans un pays où la société, dans sa grande majorité, ne parvient plus à se projeter dans l’avenir depuis des années. À force d’appuyer sur le couvercle de la marmite sociale, le risque est grand de la voir éclater. Les jeunes de moins de vingt ans n’ont d’ailleurs pas connu la décennie noire au milieu des années quatre-vingt-dix avec la guerre civile. Le tarissement des ressources économiques, issues des hydrocarbures, contribue à réduire les marges de manœuvre des autorités qui pouvaient plus facilement, autrefois, à grands coups de subventions, garantir une relative paix sociale. Or, comme en Égypte, la hausse du prix des produits de première nécessité provoque de l’appréhension vis-à-vis du comportement de populations, pour qui le recours aux circuits informels devient de plus en plus fréquent. Les difficultés budgétaires de l’Algérie l’obligent également à diversifier son économie sur le plan productif intérieur et à prendre part à la course des marchés africains sur le plan extérieur. La tenue des élections législatives au printemps 2017 donnera un aperçu du potentiel réel ou fantasmé des partis islamistes, qui cherchent à se réunir depuis quelques mois, afin de retrouver du poids sur la scène politique algérienne. Enfin, la pression démographique s’amplifie à deux niveaux : sur les côtes septentrionales où les villes s’étendent au détriment des dernières terres arables ; dans les territoires désertiques du Sahara où les migrants africains stationnent temporairement avant de tenter la traversée du pays puis de la Méditerranée. Si des émeutes éclatent encore régulièrement en Kabylie, leur récurrence s’amplifie dans les contrées méridionales algériennes où les relations entre habitants locaux et subsahariens s’avèrent difficiles.
Pour les Palestiniens, le désert d’avenir est ancien et se poursuit. À l’ONU, la Palestine n’est qu’un État observateur, même si 70 % de ses membres la reconnaissent pleinement. Si de nombreuses voix se font entendre pour prôner une solution à deux États dans le but de résoudre, en partie, le conflit israélo-palestinien, aucun progrès sur le terrain n’est enregistré. L’occupation par l’État hébreu et ses activités de colonisation obèrent la création d’une Palestine indépendante aux frontières mutuellement reconnues et clairement délimitées. Les Palestiniens cherchent désespérément des points de repère pour tenter de construire un futur meilleur, alors que leurs conditions de vie demeurent des plus précaires. Ils sont tout autant déçus par les stratégies improductives de médiation de la communauté internationale que par l’action de leur propre gouvernement à Ramallah. Bien que le Fatah et le Hamas aient trouvé un accord en janvier 2017 pour procéder à des élections législatives (les dernières datent de 2006) et former un gouvernement d’union pour permettre davantage de résilience politique et économique en Palestine, la société semble épuisée par des décennies de violences et de divisions. Contraintes dans ses déplacements, encerclée par de nombreux murs, il faut s’interroger sur la soutenabilité d’une telle situation, quelque peu relé guée à l’arrière-plan stratégique du Moyen-Orient ces dernières années. Si l’environnement régional s’est embrasé, et si l’attention sur le sort de la Palestine s’est atténuée, il serait préjudiciable d’oublier l’explosivité qui règne dans ces territoires exigus d’un point de vue géographique, mais incontestablement hyperboliques sur le plan géopolitique. Enfin, dans cette partie consacrée aux déserts d’avenir, il convient, malheureusement, de mentionner les errements stratégiques de la coopération euro-méditerranéenne. Après l’enlisement du processus de Barcelone lancé en 1995, la mise en place d’une politique européenne de voisinage (PEV) à partir de 2004 n’a pas franchement densifié les relations entre le nord et le sud du bassin méditerranéen. Malgré son renouvellement et quelques réajustements opérés depuis 2011, la PEV ne contribue que partiellement à renforcer certaines dimensions des relations bilatérales entre l’Europe et les pays du nord de l’Afrique ou du Proche-Orient. La prime aux démocraties n’est pas respectée, sinon la Tunisie aurait dû être massivement aidée ! Censée être un instrument en faveur de la coopération multilatérale, l’Union pour la Méditerranée (UpM), malgré quelques projets et succès impulsés par son Secrétariat technique, ne saurait être qualifiée de réussite. En juin 2016, les vingt-huit chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne ont adopté une nouvelle stratégie pour la politique extérieure et de sécurité européenne, dite « Stratégie globale », qui fixe la doctrine géopolitique de l’Europe. La Méditerranée, le Moyen-Orient et l’Afrique sont considérés comme des zones stratégiques et prioritaires. Mais dans ce document, l’accent est avant
Au fil de l’année… 21 novembre 2016
Doha, la capitale du Qatar, frappe le visiteur par son caractère artificiel. Le long de la corniche s’alignent des immeubles impeccables des plus grands architectes de la planète dominant des pelouses d’un vert admirable et d’une étonnante propreté. Même le souk a quelque chose de suisse ! Le pétrole et surtout le gaz ont transformé une péninsule désertique en un curieux pays dont 95 % des habitants sont étrangers. Aucun autre pays du golfe ne connaît pareille situation : au sommet de la hiérarchie, il y a les 250 000 Qataris « de souche » ; ensuite viennent les mercenaires occidentaux qui font tourner l’économie ; et puis en descendant, on trouve les travailleurs importés du sous-continent indien et d’Afrique dont le statut est parfois encore proche de l’esclavage. Mais derrière un vernis de modernité, derrière l’image du Qatar qui s’est acheté les plus grandes compétitions sportives de la planète, il y a une société rétrograde tenante d’un islam intégriste issu du wahabisme saoudien. Le Qatar ressemble un peu aux anciennes cités grecques : quelques citoyens laissant leurs femmes dans leurs gynécées, des étrangers (les métèques) et puis des esclaves, beaucoup d’esclaves. La comparaison bien sûr s’arrête là, mais le visiteur ne peut s’empêcher de s’interroger sur la capacité d’évoluer et même de survivre pour cet émirat sorti du néant par la grâce de ses réserves en hydrocarbures. Pour l’instant, tout n’est que courbettes pour ces élégants Qataris accompagnés par les ombres noires de leurs épouses. Un peuple d’esclaves (terme utilisé par un chauffeur de taxi kenyan, prisonnier de son contrat) les sert et des mercenaires les flattent tandis qu’ils rêvent d’être la Suisse d’un Moyen-Orient qui finira peut-être par les broyer.
tout mis sur le sécuritaire, et non sur le développement, alors qu’il conviendrait, comme dans le cas des enjeux migratoires, de traiter les problèmes à la source, en agissant sur les causes profondes et pas sur les effets uniquement. C’est plus largement ce qui gêne dans la dynamique des relations entre l’Europe et ses régions voisines : tout ou presque porte sur la gestion de crises, peu d’initiatives expriment des solidarités, rien ne prépare vraiment l’avenir en confiance.
Virage à l’horizon ou lointain mirage ?
Dans la région, certains pays semblent se rapprocher d’un carrefour décisif aux implications majeures. Difficile de savoir si les trajectoires auront l’allure de bifurcations propices ou si elles conjecturent, au contraire, d’une absence de mobilité et donc d’une énième rigidification, éloignant ces pays d’un futur attendu bien meilleur. Si la Jordanie, les Émirats Arabes Unis ou le Qatar avaient pu être ainsi traités, l’accent est volontairement mis sur deux pays.
La Tunisie peine à transformer l’essai démocratique en succès économiques. Plus de six ans après la seule véritable révolution que le monde arabe ait connue récemment, avec une révolte populaire initiale qui s’est progressivement traduite par une transformation complète des institutions, le pays plein de sagesses du Maghreb reste soumis aux fragilités sécuritaires et budgétaires. La Tunisie « fabrique » beaucoup de djihadistes en proportion de sa population. Sans doute parce que ni les autorités nationales ni la communauté internationale ne se décident à investir massivement dans les territoires défavorisés de l’intérieur du pays. Ce climat malsain est bien évidemment nourri par la présence de candidats à la rébellion venus des États voisins de la Tunisie. En outre, l’économie demeure incapable de redécoller. La croissance est trop faible pour créer les emplois attendus dans une société bien formée, mais dont une partie de la jeunesse est au chômage faute d’opportunités. À l’été 2016, un nouveau gouvernement d’union nationale a été chargé de redresser l’économie, de favoriser le développement d’une croissance plus inclusive et de lutter contre la corruption. La société tunisienne, notamment celle des régions rurales, saura-t-elle attendre encore trois ans pour évaluer les capacités des pouvoirs publics à convertir les promesses postrévolutionnaires en résultats concrets pour la vie du quotidien ? Il s’agit là d’une inconnue politique importante que ne simplifient pas les divisions internes rencontrées depuis quelques mois au sein de Nidaa Tounes et dont pourrait profiter Ennadha, toujours aussi actif sur le front social.
L’Arabie Saoudite, faute de modernisation à tous les étages de la monarchie, s’enlise plus dans des sables mouvants qu’elle ne progresse sur des chemins de progrès et de stabilité. Sur le front intérieur, le roi Salmane, après s’être occupé de l’ordre de succession dès son arrivée sur le trône en janvier 2015, rencontre de nombreux obstacles concernant l’évolution stratégique du modèle rentier saoudien. La vision 2030, plan novateur et ambitieux, prétend sortir d’une dépendance au
Au fil de l’année… 8 mai 2016
Ali Al-Naïmi, qui depuis des années était ministre du Pétrole d’Arabie Saoudite, vient d’être remplacé par le président de l’Aramco, Khalid A. Al-Falih. Au-delà des hommes, c’est en réalité la confirmation de la prise en main de la politique saoudienne par le fils du roi Salman, vice-héritier du trône, le prince Mohammed ben Salmane Al Saoud (MBS). La chute d’Al-Naïmi ne surprend pas. Il était le partisan d’un compromis sur le gel des productions de pétrole et semblait prêt à autoriser l’Iran à continuer son rattrapage post-embargo. À Doha, à la mi-avril, il avait dû s’incliner devant la volonté royale et manifestement il était revenu en arrière sur ses propositions au grand dam des Russes. Les choses sont désormais claires. En Arabie Saoudite triomphe une ligne à la fois dure et moderne : dure vis-à-vis des autres producteurs et surtout de l’Iran : pas question de baisser la production. Moderne parce que l’Arabie doit être capable de survivre à la baisse des prix en diversifiant son économie et en la rendant moins dépendante et plus attractive. On ne sait jusqu’où ira ce vent de réformes, mais ce pourrait être une véritable révolution pour une Arabie devenue l’archétype du conservatisme rentier.
prix du pétrole pour maintenir l’État providence dans un Royaume connu pour ses largesses sociales à des fins de contrôle politique et sécuritaire. Il faut suivre le développement de cette initiative en 2017, surtout si les recettes tirées de la manne énergétique s’accrochent à leur plafond bas en raison d’un prix du baril durablement faible. Ce scénario n’est cependant pas écrit et l’Arabie Saoudite compte encore d’importantes réserves financières, pour « arroser » la population, dans une hypothèse de fronde sociale périlleuse venant notamment des tribus contestataires. Mais l’enlisement du pays tient surtout à son action extérieure, à commencer par cette guerre menée au Yémen contre les Houthis, pour opérer par procuration contre l’Iran, plus que jamais l’ennemi numéro un vu de Ryad. Les catastrophes humanitaires, en marge des pèlerinages à La Mecque, symbolisent cette animosité volcanique dont on peut craindre un jour l’éruption. À cela s’ajoute l’activisme souterrain, mais vite discernable sur les sols arides du Moyen-Orient, que l’Arabie Saoudite déploie pour contrer les révoltes populaires à Bahreïn ou pour soutenir les forces de l’opposition en Syrie afin de faire tomber un régime alaouite allié de longue date avec Téhéran. Enfin, avec les États-Unis ou les pays européens, si les fondements de la realpolitik persistent et signent, certains épisodes montrent que les relations se refroidissent globalement plus qu’elles ne se réchauffent. Il faut dire que la question du financement du wahhabisme à travers la planète, notamment en Afrique, mais également en Europe, pose un problème désormais criant de vérité à propos de la sournoise stratégie extérieure saoudienne.
Traversées du désert : en avant ou à reculons ?
Dans cette catégorie, il convient d’abord de parler du Liban, qui s’est enfin « doté » d’un nouveau président de la République, en octobre 2016, en la personne de Michel Aoun, après plus de deux ans de vacances du pouvoir. Certes, les parrains saoudiens ou iraniens veillaient au grain, mais le pays du cèdre avait besoin de retrouver un peu de stabilité dans sa gouvernance politique locale. Il faut toutefois prendre conscience de la précarité de l’accord trouvé ayant permis d’élire ce militaire chrétien maronite à la présidence. Il peut compter sur le soutien du Hezbollah, le parti islamiste chiite, qui soutient le régime de Damas. Mais la tractation repose aussi sur l’appui de deux adversaires politiques : le chef chrétien maronite des Forces libanaises, Samir Geagea, et l’ancien premier ministre musulman sunnite Saad Hariri. Tous deux sont connus pour leur opposition au Hezbollah et à Bachar Al-Assad. Pendant ce temps, des observateurs indiquent de plus en plus fréquemment l’islamisation par le bas de la société libanaise, à travers des associations locales et des systèmes de financement qui irriguent en particulier les régions rurales de l’intérieur du pays. Parallèlement, près de deux millions de réfugiés se sont installés au Liban depuis le début de la décennie 2010, accroissant ainsi d’un tiers la population d’un pays où les équilibres confessionnels et communautaires se délitent un peu plus. Mais quelle autre société dans la région offre, comme celle du Liban, cet accueil indispensable aux migrations de détresse à l’œuvre au Proche-Orient ? Sans aucun doute la Turquie, dont il serait difficile de nier les efforts pour traiter la crise des réfugiés dans la région, au point d’en faire un élément charnière de ses rapports stratégiques avec l’Europe. Qu’on le veuille ou non, il suffit d’aller en Turquie pour voir à quel point les impacts sont grands avec de telles cohortes de populations fuyant la Syrie ou les conflits un peu plus lointains. Mais la Turquie frappe surtout les esprits par la traversée du désert politique que propose son président. Recip Tayyep Erdogan aime le pouvoir. Depuis 2002, il s’en est rarement caché. Cependant, pour le préserver, il n’hésite plus à tomber dans des pratiques musclées réprimant les moindres écarts de comportement vis-à-vis de sa ligne officielle, et notamment au sein de la fonction publique où la fréquence des purges tétanise l’administration. Les initiatives en faveur d’un culte de sa personnalité se multiplient, tout autant que les violations des libertés individuelles. La transformation sociale du pays se poursuit à marche forcée. Urbanisation ne rime plus avec sécularisation. La popularité d’Erdogan reste vigoureuse et souvent démonstrative. Il faut dire aussi que l’économie turque s’est révélée dynamique depuis le début du siècle, permettant au pays de se moderniser et d’exprimer à l’international une capacité de puissance commerciale solide. Les positions mondiales prises par le pôle aéroportuaire d’Istanbul et la compagnie Turkish Airlines illustrent parfaitement la tendance. Mais les derniers mois ont été marqués par la tentative de coup d’État dans la nuit du 15 au 16 juillet 2016, vite écartée par un pouvoir dont la vacillation apparente sur smartphone, le temps d’un flottement stratégique, s’est vite dissipée. Il n’en fallait pas moins pour que le président Erdogan crie aux complots intérieurs et étrangers, accentuant significativement ses velléités autoritaires et ses discours paternalistes envers une nation par ailleurs déstabilisée par la recrudescence des violences et la récurrence des attentats. En 2017, alors qu’une révision constitutionnelle devrait renforcer ses pouvoirs, Erdogan devra aussi gérer des situations de moins en moins confortables vis- à-vis de son voisinage régional, avec la principale inconnue du dossier kurde au sein d’un théâtre syrien où la Turquie piétine dans les territoires du nord entre résistance de l’État islamique et poussée des forces de Damas. La traversée d’un désert n’est jamais linéaire. Le risque est grand de voir la Turquie perdre ses repères démocratiques au fur et à mesure de la concentration du pouvoir dans les mains d’un seul homme.
Et si Israël tombait dans les mêmes travers ? Le Premier ministre Benyamin Netanyahou semble à la fois déboussolé et radicalisé. D’un côté, il est accusé de corruption et plusieurs affaires de scandales politiques nuisent à son image. Depuis 2009 et son arrivée à la tête du gouvernement israélien, c’est l’épreuve la plus difficile qu’il doit mener devant une opinion publique qui le soutient pour certains ou le vitupère pour d’autres. Les enjeux s’empilent autour de sa possible démission à venir. D’autre part, les équilibres politiques étant peu soutenables, il n’a eu de cesse de « droitiser » son action gouvernementale, notamment sous la pression des colons. Le Parlement a voté en février 2017 une loi qui permettra à l’État israélien de s’approprier des centaines d’hectares de terres palestiniennes en Cisjordanie occupée. Cette nouvelle entrave à la paix s’ajoute à des années d’autisme stratégique, que l’administration américaine sous Obama avait fini par dénoncer. Depuis 1993, et la signature des accords de paix d’Oslo, le nombre de colons a triplé et plus de 600 000 vivent désormais entre la Cisjordanie et Jérusalem Est. Il est probable que Benyamin Netanyahou espère de la relation avec les États-Unis désormais dirigés par Donald Trump pour se refaire une légitimité et utiliser les menaces de la région comme échappatoire à la critique nationale. Toutefois, le temps semble venu pour l’émergence d’une nouvelle génération de dirigeants israéliens capables de proposer un État sûr sur le plan sécuritaire, viable au niveau économique et plus juste sur le plan social… et territorial.
Explorateurs ou aventuriers ?
Dernière catégorie d’acteurs de ce panorama régional prospectif, celle des grands marcheurs, qui explorent depuis longtemps des contrées lointaines et qui témoignent d’un goût prononcé pour les aventures en Afrique ou au Moyen-Orient.
Les États-Unis vont-ils en 2017 faire un retour fracassant dans la région ? Alors que Barack Obama avait opté pour un désengagement des affaires moyen-orientales, qu’il convient assurément de relativiser tant la présence de Washington reste prégnante dans la zone, le nouveau président Donald Trump peut déclencher des tornades aux conséquences stratégiques hasardeuses. Son osmose avec certains pays ou leaders de la région n’est pas superposable à celle de son prédécesseur. Un certain tropisme pour Bachar, Bibi ou Al Sissi se distingue déjà. Sa détermination à combattre l’État islamique le fera se rapprocher de Moscou et d’Ankara, mais pas de Téhéran visiblement. D’ailleurs, l’accord sur le nucléaire, signé à l’été 2015, résistera-t-il si le reclassement de l’Iran dans la communauté internationale est brisé ? Et si la République islamique iranienne se remet à tirer des missiles, même en guise de provocations, il faut redouter le scénario qui pourrait se dessiner en cas de nouvelles tensions entre Washington et Téhéran. D’autres déclarations de Donald Trump et de ses équipes présentent des risques si elles se concrétisent dans les faits. Le déménagement de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem, priorité affichée du nouvel ambassadeur nommé en Israël, en est une. Si les incertitudes que provoque l’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump sont mondiales, il faut craindre tout particulièrement pour la sismicité structurelle du Moyen-Orient.
La Russie, elle, confirme sa poussée stratégique dans la région. La Syrie est devenue un protectorat militaire russo-iranien. Moscou joue aussi la carte de la défense et de la protection des Chrétiens d’Orient. Les armes russes inondent les marchés de la zone, et les ancrages en cours sur le sol libyen sont tout sauf neutres sur le plan géopolitique. Les céréales russes s’exportent en masse au Moyen-Orient et en Égypte, tout en perçant au Maghreb. De multiples investissements en matière énergétique et logistique sont effectués. La Russie prétend donc créer de la « sécurité » dans la région. Sur fond d’intérêts commerciaux bien compris, elle se réconcilie aussi avec la Turquie et entretient des relations privilégiées avec l’Iran. Cet activisme doit être suivi de près pour se demander si la puissance russe qui s’exprime dans la région n’est que conjoncturelle, ou si, au contraire, il s’agit d’une manœuvre tactique dans une séquence où les États-Unis et l’Europe ont à la fois perdu du crédit et de l’influence ces dernières années.
La Chine avance également ses pions dans la région, sans faire autant de bruit, mais avec précision. La dynamique n’est pas récente, mais elle s’amplifie. La prise de contrôle du port du Pirée, le déploiement de coopération militaire et navale, le financement de projets de développement ou d’infrastructures, la participation dans des entreprises de secteurs clés (transports, agriculture, nouvelles technologies, etc.) ou leur rachat constituent autant d’exemples qui, s’agrégeant, tissent une toile stratégique correspondant à l’internationalisation de la politique chinoise en matière de diplomatie et de commerce. La Chine est le premier partenaire commercial de plusieurs pays de la région, notamment de l’Algérie. Ces opérations s’accompagnent désormais de propositions de forums de coopération entre la Chine et les pays méditerranéens de l’Europe du Sud, après ceux lancés entre la Chine et les pays arabes ou avec l’Afrique. Ces diplomaties de coopération groupées s’inscrivent plus largement dans le développement de la route de la soie du XXIe siècle, désormais connue sous le label anglais « One Belt, One Road » (OBOR).
Pour finir, et croiser ce qui vient d’être dit, le Maroc accueillera en 2017 le forum Chine-Afrique. Tout un symbole de cette planète aux contours géopolitiques et géoéconomiques si recomposés depuis l’entrée dans le nouveau millénaire. Le Royaume chérifien a vécu l’année 2016 sous le sceau des défis climatiques. D’abord, avec une absence de pluies venue plomber les
Au fil de l’année… 17 janvier 2016
Accord définitif sur le programme nucléaire iranien et levée de l’embargo qui frappait l’Iran depuis plusieurs décennies en ce qui concerne les États-Unis : la page ouverte au moment de la prise de l’ambassade américaine à Téhéran par des « étudiants révolutionnaires » est donc tournée. Anticipé depuis plusieurs mois, cet accord ne va pas manquer de susciter maintes interrogations, tant économiques que géopolitiques. Il y a bien entendu avant tout les conséquences sur le marché du pétrole. Même si le marché avait déjà intégré dans les prix à terme les quelque 500 000 bj supplémentaires que va exporter l’Iran, la simple confirmation de l’accord va probablement coûter $ 2 ou $ 3 supplémentaires à la baisse. Ceci ne va pas arranger le budget iranien et réduira l’attrait que le marché iranien peut avoir pour les firmes occidentales. Mais, c’est du point de vue géopolitique que les conséquences de l’accord deviennent les plus difficiles à analyser. Au-delà des différences religieuses, il y a la très ancienne rivalité entre Arabes et Perses que longtemps les ÉtatsUnis – au temps du Shah – surent maintenir à égale distance. Aujourd’hui, principal soutien de Damas, directement ou par le biais de ses alliés libanais, l’Iran est de facto plus proche de la Russie. La normalisation internationale de l’Iran risque d’approfondir la cassure entre les deux rives du Golfe, le régime perse apparaissant même plus solide qu’une dynastie des Saoud manifestement à bout de souffle. Une nouvelle ère s’ouvre pour le Moyen-Orient : pas forcément plus paisible.
récoltes agricoles et donc l’économie nationale. Or le Maroc souffre encore de sérieux retards de développement social et humain, notamment dans les territoires ruraux, quand bien même des avancées significatives ont été réalisées ces dernières années. Ensuite, avec la tenue à Marrakech de la COP-22 qui devait poursuivre l’élan de la COP-21 avec l’accord de Paris sur le climat. À l’instar de la diplomatie et de l’action économique internationale du Maroc, la COP-22 s’est focalisée, à juste titre, sur l’Afrique. Il faut toutefois bien comprendre la détermination stratégique du Maroc à devenir un partenaire de premier plan sur le continent africain, comme en témoignent les investissements dans le secteur bancaire ou dans certains pays cibles comme l’Éthiopie, où une usine agroindustrielle va être construite pour fournir des engrais, grâce aux fonds mobilisés par l’Office chérifien des phosphates. Autre exemple probant, le gazoduc panafricain qui longera la côte ouest du continent pour rejoindre le Maroc puis l’Europe, tout en desservant le Sénégal, la Côte d’Ivoire et la Guinée. Ces actions stratégiques participent indirectement au retour du Maroc dans l’Union africaine, qui fut officiellement entériné en février 2017, à l’issue d’une série de tournées royales en Afrique. Sur ce continent cependant demeure une inconnue totale : le Sahel. Bombe démographique et poudrière à violences, dans laquelle les manœuvres des différents mouvements terroristes s’intensifient (Al-Qaida au Maghreb islamique, Ansar Eddine, Boko Haram), cet espace désertique représente la grande faille stratégique qui peut demain rebattre les cartes en Afrique du Nord, en Méditerranée et même au Moyen-Orient.