Diplomatie française en berne
"Boillon dégage", le slogan a aussi
fait florès sur Facebook, où on compte des milliers de messages hostiles au fringant diplomate. "Dégagez, le résident général", une allusion au temps
des colonies et du protectorat français en Tunisie.
Ce Boris Boillon est fraichement désigné à la tête de l’ambassade française de Tunis, après un séjour à Bagdad où il incarnait la diplomatie du business. En effet, le président lui a confié l’ambassade d’Irak en 2009 pour décrocher essentiellement des contrats : « la reconstruction en Irak est le marché du siècle : 600 milliards de dollars ! La France doit être aux avant-postes » annonçait Boillon au magazine Challenges.
Farouche défenseur de l’intervention américaine en Irak, Boillon n’est resté que 18 mois dans le pays. Ce qui a eu le don d’en agacer plus d’un au quai d’Orsay où les carrières se construisent dans la durée. Impossible « normalement » d’avoir l’Irak à quelques jours de son 40ème anniversaire et encore moins la Tunisie à 41 ans bien sonnés. A moins d’être le fils préféré de Sarkozy.
« Une nouvelle ère s'ouvre, avec un pays très important pour nous. C'est une mission fondamentale, et tu vas faire le job », matraque Sarkozy à son Boris à propos de la Tunisie.
Auteur du livre ‘Les diplomates’, le journaliste Franck Renaud se montre particulièrement sceptique : « Boris Boillon, c’est le diplomate star du sarkozysme.... Les cafouillages en
Tunisie prouvent qu’on avait coupé les ponts avec la société civile. C’est cela qu’il faut retrouver. La diplomatie, c’est les hommes. Est ce que c’est le bon bonhomme au bon moment ?
».
Ancien ambassadeur de France auprès des Emirats Arabes Unis, également en poste en Somalie, et en Tunisie, auteur du livre ‘Les Voies de la diplomatie’, Charles Crettien a ainsi exprimé ses réticences dans une tribune au Monde : « On ne nomme pas un ambassadeur comme on nomme un préfet. La diplomatie est un dialogue avec un pays étranger, son gouvernement et son chef d'Etat. La nomination de Boris Boillon comme ambassadeur de France en Tunisie par le conseil des ministres du 26 janvier est la négation de ce principe élémentaire, elle est donc choquante voire dangereuse pour les relations à venir entre Paris et Tunis » tempête le diplomate.
Et le scepticisme de Franck Renaud et les réticences de Charles Crétien n’ont pas tardé à se concrétiser : Ce jour, samedi 19 février,
des centaines de Tunisiens ont manifesté devant l'ambassade de France à Tunis pour réclamer le départ du nouvel ambassadeur de France, Boris Boillon, dénonçant "son manque de diplomatie", "un
comportement insultant" et "une agressivité injustifiée" lors d'une première rencontre avec la presse jeudi et au cours de laquelle le nouvel
ambassadeur avait refusé de répondre aux questions de certains journalistes ou les avait qualifiées de "questions débiles" ou de "n'importe
quoi".
"M. Boillon, vous occupez un poste diplomatique et vous n'avez rien d'un diplomate", "dégagez, petit Sarko!", "Boris dégage!", " vous faites honte à la France", "La Tunisie, tu la respectes ou tu dégages", "Colonialiste dégage", "tu pousses trop loin le bouchon, Boris"...., pouvait-on lire sur les banderoles des manifestants, mobilisés par des appels sur Facebook.
D’autres participants réprouvent son affectation "contraire aux usages diplomatiques".
Suite à son manque de tact, voire à son impolitesse, Boris Boillon a regretté son geste et a fait preuve d'une humilité certaine en présentant platement ce jour ses excuses au peuple tunisien et plus particulièrement aux journalistes du pays.
Des extraits de la rencontre de Boillon avec les journalistes autochtones ont été diffusés à la télévision tunisienne ainsi que sur Facebook :
Information Choc : la France débloque 350.000 euros d'aide d'urgence à la Tunisie.
Débilité !