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le blog lintegral

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Sarko, Bettencourt et la Justice.....

Publié par medisma sur 31 Août 2011, 19:51pm

Catégories : #lintegral

Sarko m'a tuer

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Le  livre  «Sarko m'a tuer»,  publié ce mercredi par deux journalistes du Monde,  relance avec fracas l'affaire Bettencourt. Il rassemble moult déclarations inédites de personnalités à charge contre Nicolas Sarkozy et son entourage.

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Une phrase dans ce livre fait l'effet d'une bombe. Parce que son auteure est une magistrate au sommet de l'institution judiciaire, la juge Isabelle Prévost-Deprez, dessaisie de l'affaire Bettencourt : Elle  accuse directement Nicolas Sarkozy d'avoir reçu des espèces chez Liliane Bettencourt avant son élection en 2007.

 

 

 

 

 

 

 Bettencourt: l'Elysée en travers de la justice

 mediapart logo Nicolas Sarkozy pensait l'incendie éteint. Il ne l'est pas. L'affaire Bettencourt est bel et bien, comme nous l'écrivons depuis de longs mois, un scandale d'Etat qui menace le cœur même de cette présidence.

Dans une démarche inédite, qui dit en creux combien la justice n'a cessé d'être humiliée par Nicolas Sarkozy, c'est au tour d'une juge de monter au front et de dénoncer. Dans le livre Sarko m'a tuer, que publient le 1er septembre, Fabrice Lhomme, collaborateur de Mediapart avant de rejoindre Le Monde au mois de mai, et Gérard Davet, également journaliste au Monde, la magistrate Isabelle Prévost-Desprez raconte par le menu les pressions et manœuvres répétées du pouvoir et l'affolement qui a saisi le clan sarkozyste devant les développements de cette affaire.

Présidente de la 15e chambre du tribunal de grande instance de Nanterre, la juge avait été chargée le 13 juillet 2010 d'un supplément d'information sur l'ensemble de l'affaire Bettencourt. Après des mois d'affrontements avec le procureur Philippe Courroye, elle a été dessaisie, l'ensemble du dossier étant transféré, à l'automne 2010, au tribunal de Bordeaux où les informations judiciaires sont aujourd'hui toujours en cours.

  Dès l'été 2010, Mediapart avait raconté par le menu la mobilisation des proches de Nicolas Sarkozy pour brider l'enquête judiciaire en cours. Nous avions en particulier souligné le rôle décisif joué par le procureur Philippe Courroye, soumis au pouvoir, menant ses enquêtes préliminaires selon son bon vouloir, et dont plusieurs procédures ont depuis été cassées.

 Nous avions dénoncé ce qui s'est apparenté à un coup d'Etat judiciaire, notant : « La menace sur le pouvoir politique est telle (présomptions de financements illégaux, de trafic d'influence, de prise illégale d'intérêts, de concussion) qu'un dispositif d'exception est en train de se mettre en place sous nos yeux ». Dans le même temps, les deux principaux syndicats de magistrats (USM et SM) comme la plupart des associations de magistrats et d'avocats faisaient savoir leur indignation. Et un Appel pour une justice indépendante et impartiale recueillait sur notre site plus de 30.000 signatures.

  C'est aujourd'hui au tour de la magistrate qui fut directement en charge de détailler les manœuvres du pouvoir. « Ce procès représentait pour l'Elysée un risque majeur, dit-elle à nos deux confrères, il y avait 90% de chances pour que ce soit déflagratoire. Il fallait me faire dessaisir, par tous les moyens. Il était impératif de me débarquer.»

   A l'appui de son propos, la magistrate donne deux types d'exemples.

  Le premier a trait aux pressions exercées sur les témoins quand il s'agit d'évoquer des financements politiques illégaux de Nicolas Sarkozy. « Ce qui m'a frappée dans le supplément d'information que j'ai conduit, c'est la peur des témoins, dit-elle. Ils étaient effrayés de la violence avec laquelle Claire Thibout (l'ex-comptable de Liliane Bettencourt - ndlr) avait été déstabilisée, ils ne voulaient pas connaître son sort .»

«Je ne pouvais pas le dire sur procès-verbal»

La juge cite alors « l'infirmière de Liliane Bettencourt qui a confié à ma greffière, après son audition par moi : «''J'ai vu des remises d'espèces à Sarkozy, mais je ne pouvais pas le dire sur procès-verbal'' ». Une magistrate faisant état de confidences rapportées et hors procès-verbal : l'Elysée a eu beau jeu de s'indigner, ce mercredi matin, de la méthode inédite, d'autant que cette affirmation n'a pas donné lieu à une enquête de nos deux confrères pour la vérifier. Mais sans doute faut-il prendre cet épisode comme une illustration des pressions exercées sur les principaux témoins plutôt que comme une nouvelle révélation.

Plus intéressantes sont les explications données dans ce livre par Claire Thiboult, l'ex-comptable qui fut au cœur du scandale. Le 6 juillet 2010, Mediapart recueillait et publiait son témoignage sur la remise d'argent liquide (150.000 euros) à Eric Woerth pour le financement de la campagne présidentielle, sur les « enveloppes » données au politique et sur le financement de Sarkozy. Témoignage ensuite répété sur procès-verbal à plusieurs reprises devant la police et la justice, et confirmé par plusieurs autres employés de Liliane Bettencourt, dont son chauffeur.

 Témoignage également confirmé par des éléments matériels : les agendas de Claire Thiboult, qui font état des retraits bancaires et des rencontres avec Eric Woerth, les carnets du photographe François-Marie Banier.

Dans Sarko m'a tuer, Claire Thiboult revient sur les pressions subies de la part des enquêteurs, aussitôt après la publication de notre article : « Les policiers voulaient me faire dire que Mediapart était un journal de voyous (...) Comme je me sentais très mal, j'ai lâché sur un point précis, celui du financement éventuel de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur, que les propos figurant dans l'article de Mediapart relevaient de la ‘'romance''. C'est cette expression qui sera ensuite utilisée pour tenter de décrédibiliser mon témoignage. »

  « Les policiers n'étaient pas contents, ajoute Claire Thiboult,ils voulaient que je leur dise que tout était faux. Ils subissaient eux-mêmes une incroyable pression. A chaque feuillet tapé, l'un des quatre policiers faxait le PV à sa hiérarchie et au parquet de Nanterre, qui rappelait pour faire changer tel ou tel mot. »

  Nous y sommes. L'ex-comptable évoque là ces deux journées des 7 et 8 juillet 2010, où l'Elysée prend directement en mains la contre-offensive. Le 8 juillet au matin, Le Figaro et Le Monde publient des extraits tronqués du procès-verbal d'audition de la comptable (fuites organisées par le pouvoir), où est mis en exergue le mot « romance ». Dans la foulée, Claude Guéant estime que la « vérité est rétablie », et l'UMP sonne l'hallali contre Mediapart. Cela ne dure que quelques heures.

Espionnage tous azimuts

Le soir même, Mediapart publie l'intégralité du procès-verbal de Claire Thiboult dans lequel elle confirme les enveloppes d'argent liquide données « à des politiques ». La manœuvre de Claude Guéant est éventée. Xavier Bertrand, alors secrétaire général de l'UMP, nous accuse de « méthodes fascistes ». A la suite d'une plainte en diffamation déposée par Mediapart, il a été mis en examen il y a quelques semaines. Nous avions fait le récit de ces épisodes dans plusieurs articles :

Aux pressions exercées sur les témoins, Isabelle Prévost-Desprez ajoutent celles que doivent subir les policiers et les magistrats. « J'ai été l'objet de surveillances, affirme-t-elle,c'est une évidence, mais je n'en ai rien à faire, je peux tout assumer dans ma vie, même si ça m'ennuie de savoir que certains utilisent des éléments de ma vie privée pour tenter de m'affaiblir. J'étais persuadée d'être sur écoutes. Des écoutes illégales à mon avis. Cela a toujours été clair pour moi, je ne me pose même plus la question ».

Un juge accusant le pouvoir de surveillance et d'écoutes illégales... Là encore, la magistrate vient renforcer ce que nous avions écrit sur la mise sous surveillance des acteurs de ce dossier comme des journalistes. Un cambriolage à Mediapart, avec le vol d'ordinateurs et d'une copie des enregistrements réalisés par le majodorme de Liliane Bettencourt (nous avons porté plainte); la surveillance téléphonique d'un journaliste duMonde pour identifier une de ses sources à la Chancellerie (le quotidien a porté plainte) ; un cambriolage au Point et là encore, le vol de l'ordinateur du journaliste en charge de cette affaire : le 3 novembre, Edwy Plenel expliquait comment Mediapart était l'objet d'une surveillance illégale.

  « Notre journal, écrivait-il, fait l'objet depuis plusieurs mois d'un espionnage tous azimuts. Fabrice Arfi et Fabrice Lhomme, les deux journalistes de Mediapart spécialisés dans les enquêtes sensibles pour l'Elysée, notamment les affaires Karachi et Bettencourt, auraient eu droit, depuis mars-avril, à des surveillances téléphoniques afin d'établir une cartographie de leurs relations et contacts.

 « Nos sources nous affirment que Fabrice Arfi et Fabrice Lhomme, voire d'autres membres de notre équipe, auraient eu droit au même traitement que leur confrère du Monde, Gérard Davet, ou que la juge de Nanterre, Isabelle Prévost-Desprez, dont les «fadettes» (factures détaillées) des téléphones portables ont été explorées par la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI).

  « Surtout, on nous affirme que cette inquisition d'Etat est impulsée et coordonnée par le secrétaire général de l'Elysée lui-même, Claude Guéant. «Ils sont déchaînés», a confié un ministre important du gouvernement à l'un de ses proches qui nous l'a rapporté. Cet interlocuteur nous assure que ce ministre savait, dès septembre, que les médias en pointe sur le dossier Bettencourt feraient l'objet d'opérations clandestines, citant explicitement Mediapart, Le Monde et Le Point, soit précisément les trois journaux victimes en octobre de vols ou de cambriolages. »

Relancer le dossier qui est à Bordeaux

A la suite de cet article, Claude Guéant déposait plainte pour diffamation contre Mediapart. Une plainte qu'il a discrètement retirée au printemps, redoutant sans doute un procès programmé pour cet automne et pour lequel nous comptions faire citer plusieurs dizaines de témoins et demander l'audition de Nicolas Sarkozy.

Le récit des coulisses de cette affaire par la juge qui en a eu la charge ne fait pas que confirmer les nombreuses enquêtes que nous avons publiées en 2010. Il peut désormais réveiller un dossier dont tout laisse penser qu'il est en train d'être étouffé à Bordeaux malgré des enquêtes menées par cinq magistrats et qui se poursuivent en trois directions : financement politique illégale ; trafic d'influence concernant Eric Woerth ; blanchiment de fraude fiscale.

Car on imagine mal les magistrats de Bordeaux ne pas vouloir entendre l'infirmière de Liliane Bettencourt, la greffière et Mme Prévost-Desprez elle-même sur ces conversations hors procès-verbal mais relatant un financement illégal du président de la République. De même, le choix fait par la magistrate de Nanterre de parler publiquement d'une affaire en cours et qu'elle a eue à instruire pourrait déclencher une procédure disciplinaire, le Conseil supérieur de la magistrature venant à se mêler de ces révélations.

 Dans les deux cas, l'affaire Bettencourt continuera à menacer directement cette présidence par ailleurs cernée par les scandales avec les développements de l'affaire Karachi et ceux à venir du scandale Takieddine, que nous explorons depuis deux mois.

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