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Ukraine : La Crimée est dans le giron de la Russie et l'illusion d’une toute puissance de Washington, est aujourd’hui terminée

Publié par medisma sur 20 Mars 2014, 15:08pm

La Crimée est dans le giron de la Russie et l'illusion d’une toute puissance de Washington, est aujourd’hui terminée
I- Ukraine: responsabilité et irresponsabilités

 

Jacques Sapir


La Crimée retournera donc dans le giron de la Russie. La déclaration de Vladimir Poutine du 18 mars devant les deux assemblées de Russie, le gouvernement et les gouverneurs l’a confirmée. La signature symbolique du texte d’Union et la mise en place d’une période transitoire jusqu’à 2015, mais où la séparation entre la Crimée et l’Ukraine est qualifiée de frontière de la Russie, le confirme. Certes, ce référendum ne s’est pas déroulé de manière conforme au droit international. Il n’y a pas eu d’observateurs officiels (car officieusement plusieurs députés européens étaient présents), mais la faute en incombe largement aux autorités européennes. Certes, on a pu signaler ici ou là des pratiques qui sont condamnées par le droit ; mais nous savons aussi que c’est le cas en France. Sur le fond, il est clair que la population a massivement voté, et qu’elle s’est prononcée en faveur du rattachement de la Crimée à la Russie. Notre pays, qui s’est tant battu pour le principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, s’honorerait en reconnaissant ce fait, quoi que l’on puisse penser de la chaîne d’événements qui y ont conduit. Mais, derrière les festivités qui, à Moscou et en Russie, entourent cet événement tout comme derrière l’amertume clairement perceptible aux Etats-Unis et dans les pays de l’Union européenne, on oublie l’essentiel : la crise ukrainienne est loin d’être terminée. Cette crise se concentre aujourd’hui sur les régions de l’Est de l’Ukraine où, ces derniers jours, les manifestations de la partie prorusse de la population se sont manifestées et où les premières victimes ont été déplorées.

Le dilemme de la Russie.

Dans sa déclaration du 18 mars, Vladimir Poutine a dit deux choses qui semblent également importantes, même si elles peuvent paraître contradictoires. D’une part, le Président russe s’est nettement prononcé pour une Ukraine indépendante et souveraine. De l’autre, il a indiqué que la Russie ne pouvait et pourrait se désintéresser du sort des populations russes en Ukraine. Si la situation continue de se dégrader en Ukraine, la logique de protection des populations rentrera rapidement en conflit avec la première affirmation. C’est pourquoi il est plus que jamais nécessaire que le gouvernement actuel de Kiev se fonde dans un gouvernement de concorde nationale où toutes les parties seraient représentées et que soient mis en place les conditions de l’élection d’une assemblée constituante qui seule sera légitime pour reformuler le pacte national. Les États de l’Union Européenne et les États-Unis affectent de croire que d’une part on a été confronté à une « révolution » les 22 et 23 février à Kiev et d’autre part que cette « révolution » n’a pas altérée la continuité constitutionnelle. C’est au mieux une dangereuse illusion, au pire la marque d’un rare cynisme. Pourquoi, alors, le parti neo-fasciste SVOBODA qui fit environ 10% de voix aux dernières élections dispose-t-il de 6 ministres sur 19 alors que le Parti des Régions, qui fut le large vainqueur de ces mêmes élections n’en a-t-il aucun ? Cette situation n’est pas tenable. Elle ne peut que convaincre les populations russes de l’Est de l’Ukraine que l’on est en présence d’un coup d’État dont elles sont appelées à être les prochaines victimes. Ce gouvernement de fait vient d’ailleurs d’annoncer la constitution d’une « garde nationale » dans laquelle seraient regroupées les bandes armées, et qui se substituerait à l’Armée Ukrainienne, dont on comprend les réticences à intervenir dans cette situation. Face aux bandes armées de l’extrême-droite ukrainienne se constituent déjà des groupes d’auto-défense. La logique de l’affrontement est en marche, et cette logique a déjà tué. À terme, si l’on y prend garde, c’est à une évolution à la Yougoslave que l’on se dirige.

Responsabilité et irresponsabilité des pays européens.

La responsabilité des pays européens est immense, bien plus grande en fait que celle des Etats-Unis car ils ont l’expérience de cette situation, et elle se déroule littéralement à leur porte. Ils peuvent se complaire dans l’amertume née de leur impuissance, condamner encore et encore la Russie, brandir des menaces de sanctions toutes aussi dérisoires les unes que les autres. S’ils choisissent cette voie, ils choisiront l’impuissance et ils feront la démonstration de leur incapacité à sortir des ornières de l’idéologie. S’ils choisissent cette voie, ils se condamnent à être les acteurs d’un drame qui se prépare sous nos yeux : celui de la partition violente de l’Ukraine. S’ils choisissent cette voie, ils seront dans l’incapacité de garantir ce qu’ils prétendent garantir, soit l’unité, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine. On saura, de par le monde, ce que vaut alors une garantie des pays européens. Ils vous promettent la paix, mais ils apportent, du fait de leur impéritie, la guerre civile. Ou alors, ils peuvent décider de mettre leur rancœur au placard, et s’entendre avec la Russie en prenant Vladimir Poutine au mot : vous êtes pour l’indépendance et la souveraineté de l’Ukraine ? Fort bien, agissons de concert pour la garantir.

Si ces gouvernements s’entendent pour dire clairement aux ukrainiens qu’il faut un gouvernement de concorde nationale et une Assemblée Constituante, s’ils acceptent de participer au désarmement des milices, ils peuvent exiger en retour que la Russie s’abstienne de tout geste dangereux et nuisible, et qu’elle utilise son influence, qui n’est pas petite, dans l’Est de l’Ukraine pour que soit désarmés aussi les groupes d’auto-défense. La Russie s’est, jusqu’à maintenant, bien gardée de riposter aux sanctions symboliques qui ont été prises. Qu’elle continue dans cette voie et qu’elle s’engage à respecter les résultats de l’élection de l’Assemblée Constituante qui, seule, sera porteuse de légitimité. Qu’elle s’engage aussi à renouveler au gouvernement qui sera issu de cette Assemblée Constituante les conditions économiques avantageuses qu’elle avait proposée au gouvernement Ianoukovitch.

Affronter le futur.

On veut espérer que la voix de la Raison triomphera, même si cette voix est bien faible et bien balbutiante aujourd’hui à Paris comme à Washington. On le veut pour les Ukrainiens d’abord, qui ont le droit de vivre dans la paix et la stabilité tant sociale que politique. On le veut pour l’Europe, qu’il ne faut moins que jamais confondre avec l’Union européenne, et qui serait la grande perdante d’une nouvelle logique d’affrontement.

Cependant, une leçon doit être tirée, non pas de cette seule crise, mais de la configuration générale des événements qui vont de la décision des Etats-Unis d’envahir l’Irak en 2003 à la question syrienne en passant, bien entendu, par la crise ukrainienne. Se referme la courte parenthèse d’une XXIème siècle que l’on voulait dominer par l’hyper-puissance Étatsunienne. Tel était le diagnostic que je faisais dans un livre publié en 2008[1], et qui est aujourd’hui toujours plus d’actualité. Nous sommes bien confrontés au retour des nations. L’effacement provisoire de la Russie, qui avait pu donner cette illusion d’une toute puissance de Washington, est aujourd’hui terminé.

[1] Sapir J., Le Nouveau XXIè Siècle, le Seuil, Paris, 2008.

 

Par Jacques Sapir


 

II- Jean-Marie Le Pen sur le problème ukrainien

 

 

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