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Jacques Sapir : «Manuel Valls est un candidat qui arrive usé à la primaire»

Publié par medisma sur 7 Décembre 2016, 23:02pm

 

Jacques Sapir : «Manuel Valls est un candidat qui arrive usé à la primaire»

© Manuel Valls

 

 

Une candidature de Manuel Valls peut-elle être couronnée de succès alors qu'il représente le mandat de François Hollande ? L'économiste Jacques Sapir se penche sur les chances de l'ex-Premier ministre de réussir face à ses rivaux de gauche.

RT France : Pensez-vous que Manuel Valls soit un bon candidat pour remporter effectivement la primaire ?

Jacques Sapir (J. S.) : Tout d’abord, Manuel Valls est un candidat qui arrive usé à la primaire. Il arrive usé, parce qu’il est au gouvernement depuis maintenant trois ans, il a d’une certaine manière assumé les différentes décisions prises par François Hollande, y compris les plus contestées - comme la fameuse Loi Travail El Khomri - qu’il a dû faire passer avec une disposition particulière de la Constitution française, ce qu’on appelle l’article 49.3 et qui n'est autre qu'un vote bloqué en réalité. Il arrive, d’une certaine manière, usé. Néanmoins, on sait que les personnes qui se déplaceront à la primaire ne constituent pas exactement l’électorat du parti – c’est la même chose pour la primaire de la droite. On peut considérer que la droite a fait grosso modo entre 12 à 16 millions de voix aux élections, et il y a eu 4 millions de gens qui se sont déplacés à la primaire – c'est la même chose pour le Parti socialiste. Et [Manuel Valls] devra à la fois essayer de combiner sa loyauté à François Hollande parce qu'elle lui donne une forme de légitimité à l’intérieur de l’électorat socialiste, mais aussi marquer sa différence de manière crédible par rapport à la politique de François Hollande. Et cela risque de ne pas être du tout facile pour lui.

On voit très bien la grande crainte des socialistes d’être non seulement exclus du deuxième tour, mais en plus de terminer quatrième ou cinquième 

RT France : Pourquoi Manuel Valls se présente-t-il, s'il est considéré comme celui qui s'est battu pour toutes les décisions contestées de François Hollande ?      

J. S. : Il y a plusieurs réponses possibles. La première, c’est tout simplement l’impulsion. On peut penser que, dans le système français, le président de la République agit comme un miroir aux alouettes : il fait perdre le sens de la réalité à toute une série des personnalités politiques. Deuxième explication, plus sérieuse : si Manuel Valls veut espérer contrôler le Parti socialiste, il doit se présenter à l’élection présidentielle, même s’il n’a aucune chance d’être élu. Mais il doit se présenter et surtout tenter de faire un score au premier tour qui soit supérieur au score de Jean-Luc Mélenchon qui sera l’adversaire tout particulier d’un candidat socialiste. Parce que, aujourd’hui, Jean-Luc Mélenchon se situe plus à gauche que le Parti socialiste. On voit très bien la grande crainte des socialistes d’être non seulement exclus du deuxième tour, mais en plus de terminer quatrième ou cinquième, devancés par Jean-Luc Mélenchon ou peut-être Emmanuel Macron. C’est d’ailleurs cette crainte qui a le plus probablement fait renoncer François Hollande à se représenter.

La bataille n’est pas tant pour le deuxième tour que de nombreux socialistes considèrent comme d’ores et déjà perdu pour leurs candidats, que pour savoir qui prendra l’ascendant à gauche

RT France : Considérez-vous toujours Emmanuel Macron comme une candidature qui a des chances de se qualifier au deuxième tour ?

J. S. : Actuellement il n’a aucune chance. Emmanuel Macron peut-être à la fois contesté sur sa droite si François Bayrou se présente, et contesté sur sa gauche si Manuel Valls se présente, car on voit très bien que le possible programme de ce dernier sera assez peu différent de celui d’Emmanuel Macron. En réalité, si l’on veut se qualifier pour le deuxième tour, il faudra faire plus de 22-24%, puisque c’est le niveau auquel on place désormais Marine Le Pen et le Front national. Actuellement, que ce soit Emmanuel Macron, entre 14 et 16%, ou que ce soit Manuel Valls, entre 12 et 14%, l’un et l’autre sont loin du compte. En fait, on voit bien que la bataille n’est pas tant pour le deuxième tour que de nombreux socialistes considèrent comme d’ores et déjà perdu pour leurs candidats, que pour savoir qui prendra l’ascendant à gauche : Manuel Valls, Emmanuel Macron ou Jean-Luc Mélenchon, qui est en train de monter très vite dans les intentions de vote ? Il fait aujourd’hui entre 14 et 16% et pourra monter à 18-19%.

Tout dépend beaucoup du candidat que choisiront les socialistes

RT France : Pensez-vous que Jean-Luc Mélenchon puisse être un candidat pour rassembler la gauche ?

J. S. : Tout cela dépend beaucoup du candidat que choisiront les socialistes. Si les socialistes choisissent Arnaud Montebourg, Jean-Luc Mélenchon aura un véritable problème de positionnement par rapport à lui. Dans cette hypothèse, Emmanuel Macron pourrait faire le plus grand nombre de voix parce qu’on voit bien que les électeurs de centre-gauche quitteraient Arnaud Montebourg pour se rallier à lui alors qu’Arnaud Montebourg pourrait séduire des électeurs beaucoup plus ancrés dans la gauche du Parti socialiste. Mais si le candidat du Parti socialiste est Manuel Valls, il n’est pas du tout impossible qu’une partie des électeurs du Parti socialiste se rallient à Jean-Luc Mélenchon, qui a un programme beaucoup plus cohérent que ceux de ses adversaires à gauche. Il faut donc bien dire qu’ils sont dans une incohérence liée à leur soutien à la politique de François Hollande. Car même Emmanuel Macron qui a, certes, démissionné du gouvernement, a été pendant deux ans ministre dans un gouvernement Valls, et sous François Hollande.

Jean-Luc Mélenchon, quant à lui, va bénéficier de la plus grande cohérence de son programme. Aujourd’hui, le «non» au référendum italien est en train de changer beaucoup de choses dans la vie politique en Europe et en particulier en France. On voit que, dans ce contexte, il y a deux candidats qui vont en profiter massivement : le premier, c’est Jean-Luc Mélenchon. Et le deuxième, c’est Marine Le Pen.

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